Utilisation du baclofene dans le traitement de l'alcoolo-dependance

P o i n t d ’ i n f o r m a t i o n
Utilisation du baclofène dans le traitement de l’alcoolo-dépendance : actualisation

De nouvelles données relatives à l’utilisation et à la sécurité d’emploi du baclofène (Lioresal et
générique) dans le traitement de l’alcoolo-dépendance conduisent l’Agence française de
sécurité sanitaire des produits de santé (Afssaps) à actualiser son point d’information de juin
2011. Si l’efficacité du baclofène dans la prise en charge de l’alcoolo-dépendance n’est pas
encore démontrée à ce jour, de nouvelles données observationnelles montrent des bénéfices
cliniques chez certains patients.
Concernant spécifiquement cette utilisation hors du cadre actuel de l’autorisation de mise sur
le marché (AMM), les données de pharmacovigilance restent très limitées. Une meilleure
connaissance du profil de sécurité d’emploi du baclofène dans ce cadre est absolument
nécessaire et justifie de maintenir une surveillance très active de l’Afssaps et des
professionnels de santé.
L’Afssaps rappelle que la prise en charge de l’alcoolo-dépendance implique une approche
globale par des médecins expérimentés dans le suivi de ce type de patients dépendants. Le
recours au baclofène doit être considéré au cas par cas et avec une adaptation posologique
individuelle afin de garantir dans le temps la dose utile pour chaque patient.
Au mois d’avril 2012, l’Afssaps a autorisé le lancement d’un essai clinique contrôlé, chez des
patients présentant une consommation d’alcool à haut risque qui seront suivis pendant au
minimum un an.
Face à l’enjeu de santé publique que représente la lutte contre l’alcoolisme, l’Agence
encourage le développement d’autres études que ce soit de la part d’équipes académiques ou
d’industriels afin d’optimiser l’emploi de cette molécule.

Ce point d’information fera l’objet d’une nouvelle actualisation dans un délai de 6 mois.

Rappel

Le baclofène est un agoniste des récepteurs GABA-B (acide -aminobutyrique) qui sont impliqués, au niveau du système nerveux central, dans le circuit dit de « expérimentales suggèrent que la stimulation de ces neurorécepteurs correspond à un effet anxiolytique, ainsi qu’à un effet sur la dépendance et l’appétence à l’alcool. Le baclofène a été autorisé en 1975 dans le traitement des contractures musculaires involontaires (spasticité) d'origine cérébrale ou survenant au cours d’affections neurologiques, telles que la sclérose en plaques ou certaines maladies de la moelle épinière. Dans l’indication de l’AMM, le schéma posologique recommandé chez l'adulte débute à 15 mg par jour de baclofène par voie orale en 2 à 3 prises et augmente progressivement jusqu'à obtention d’une dose quotidienne qui se situe entre 30 et 75 mg par jour. En milieu hospitalier, des posologies journalières de 100 à 120 mg peuvent être atteintes. Si l'objectif thérapeutique n'est pas obtenu après 6 à 8 semaines de traitement aux doses maximales, la poursuite du traitement doit être reconsidérée. À l’arrêt du traitement, la dose doit être diminuée progressivement en raison du risque de survenue d’un syndrome de sevrage en cas d’arrêt brutal. Dans les publications disponibles relatives à l’alcoolo-dépendance, la titration est également la règle avec une augmentation très progressive des doses. Les posologies mentionnées dans les études sont variables, allant de 30 à 60 mg ou de 90 à 120 mg par jour selon les essais, certains patients pouvant avoir reçu des doses encore plus élevées. 1. Les données sur l’efficacité du baclofène dans l’alcoolo-dépendance
Les études cliniques comparatives en double insu versus placebo actuellement disponibles ne permettent pas de conclure quant à l’efficacité du baclofène dans le traitement de l’alcoolo-dépendance (1, 4, 11). Elles ont en effet été menées sur de courtes périodes (4 à 12 semaines) et n’ont concerné que de petits effectifs, traités par des posologies limitées à l’AMM actuelle, soit de 30 à 60 mg/J. En revanche, une étude observationnelle récente (18), fondée sur la pratique de médecins expérimentés et menée sur une période d’un an, a montré des données d’efficacité (abstinence ou réduction de la consommation compulsive) chez certains patients. Toutefois, ces travaux ne permettent de définir ni la fourchette thérapeutique optimale, ni le schéma d’augmentation et de réduction éventuelle des doses. De plus, le recours à des posologies journalières supérieures à celle de l’AMM a entraîné des effets indésirables chez une majorité de patients. L’ensemble de ces études ne permet donc pas d’établir des recommandations consensuelles sur l’utilisation du produit dans ce cadre. Par conséquent, le traitement par baclofène ne peut être envisagé qu’au cas par cas, prescrit
et surveillé par des praticiens expérimentés dans la prise en charge de l’alcoolo-dépendance
avec une adaptation posologique individuelle et une surveillance rapprochée de la réponse
thérapeutique et de la survenue des effets indésirables.

2. Les données de sécurité d’emploi du baclofène dans l’alcoolo-dépendance
Un premier bilan annuel de pharmacovigilance a été établi en mars 2012 sur la base du suivi national renforcé mis en place par l’Afssaps, début 2011(20). Il y est ainsi confirmé que les effets indésirables les plus fréquemment notifiés sont des effets sédatifs (majorés en cas de prise concomitante de psychotropes et/ou d’alcool), des états confusionnels associés ou non à des troubles mnésiques, et des vertiges. Le baclofène utilisé dans le traitement des addictions a un profil d’effets indésirables typique des médicaments GABAergiques, mais il s’en distingue par : le risque convulsif en cours de traitement, le syndrome des jambes sans repos, les troubles musculaires paradoxaux, l’hypotension artérielle, la dangerosité liée à l’accumulation en cas d’insuffisance rénale et les troubles urinaires. Les effets indésirables suivants sont survenus et demandent une confirmation ultérieure : aggravation de syndromes extrapyramidaux (diminution de la libération de dopamine au niveau nigro-strié), syndrome dépressif, hépatites, induction d’épisode d’encéphalopathie hépatique, abus, désinhibition/euphorie, syndrome de sevrage (en relation avec une mauvaise observance), complications en lien avec un surdosage volontaire ou involontaire. La pharmacologie du baclofène laisse également prévoir des effets indésirables qui, à ce jour, n’ont pas été notifiés : syndrome amotivationnel (par down regulation dopaminergique), hémorragies digestives gastriques et/ou duodénales (par stimulation de la sécrétion acide), syndrome sérotoninergique dans le cadre du sevrage, abus à des fins dopantes. L’Afssaps rappelle que le baclofène doit être utilisé avec précaution chez les patients insuffisants hépatiques ou insuffisants rénaux, ayant des antécédents d'ulcère gastrique ou duodénal, de troubles rénaux, d'états confusionnels, de troubles psychotiques, de dépression, d'affection vasculaire cérébrale ou d'insuffisance respiratoire. Par ailleurs, la prise concomitante de baclofène avec certains médicaments nécessite une surveillance rigoureuse de l'état clinique et biologique du malade en raison du risque de majoration des effets indésirables, notamment avec les antihypertenseurs, les dépresseurs du système nerveux central et la lévodopa. L’interprétation de ce bilan de pharmacovigilance doit prendre en compte une sous-
notification probablement très importante des effets indésirables du baclofène lors de la prise
en charge de l’alcoolo-dépendance. Compte tenu de cette sous-notification, il n’existe pas
actuellement de signal remettant en cause la poursuite de cette utilisation. Une meilleure
connaissance du profil de sécurité d’emploi du baclofène reste absolument nécessaire et
justifie de maintenir une surveillance très active.

Les professionnels de santé sont encouragés à y contribuer en notifiant tout effet indésirable
au centre régional de pharmacovigilance dont ils dépendent.

(http://www.ansm.sante.fr/Activites/Pharmacovigilance/Declarer-un-effet-indesirable-lie-a-l-
utilisation-d-un-medicament/(offset)/4#paragraph_35658)

De même, la possibilité offerte depuis le mois de juin 2011 aux patients et à leur entourage de
faire directement une déclaration constitue une source supplémentaire d’informations.

(http://www.ansm.sante.fr/Activites/Pharmacovigilance/Declarer-un-effet-indesirable-lie-a-l-
utilisation-d-un-medicament/(offset)/4#paragraph_35657)

Conclusions de la commission nationale de pharmacovigilance du 22 mai 2012
La commission nationale de pharmacovigilance a considéré que le profil de sécurité du baclofène lors de son utilisation hors-AMM dans l’alcoolo-dépendance n’était pas évaluable à ce jour au vu du peu de données disponibles (probable très importante sous-notification). Cependant, des signaux potentiellement alarmants provenant des données de toxicovigilance ont été mis en évidence (http://www.centres-antipoison.net/CCTV/index.html). Il s’agit en particulier d’un risque suicidaire qui pourrait être expliqué par un effet pharmacologique dépressogène du produit.  3. Nécessité d’inscrire l’utilisation dans une prise en charge globale du patient
Les difficultés du sevrage alcoolique résident notamment dans les facteurs psycho-sociaux étroitement associés à la dépendance. Les patients doivent donc faire l’objet d’une prise en charge globale et de mesures individualisées. La prescription d’un traitement médicamenteux doit être assurée par un médecin expérimenté dans la prise en charge globale de l’alcoolisme, notamment avec un soutien psychologique régulier. Les patients qui reçoivent du baclofène doivent faire l’objet d’un suivi rapproché et adapté puisqu’il existe une grande variabilité interindividuelle de la dose utile. La survenue d’effets indésirables doit également être recherchée. Dans l’attente de la mise en vigueur du dispositif de recommandations temporaires
d’utilisation (RTU), prévu par la Loi du 29 décembre 2011, qui pourra, si elle est justifiée,
donner un cadre cohérent à la prescription du baclofène hors AMM, l’Afssaps recommande
que la prescription et la prise en charge soit effectuée par des médecins formés et impliqués
dans la prise en charge de l’alcoolo-dépendance qu’il s’agisse de psychiatres,
d’addictologues, d’alcoologues ou de généralistes, idéalement de manière pluridisciplinaire*.

4. Mise en place d’essais cliniques
Au mois d’avril 2012, l’Afssaps a autorisé le démarrage d’un premier essai clinique académique en milieu ambulatoire (BACLOVILLE). Il s’agit d’une étude randomisée, en double insu, dont l’objectif est de montrer, comparativement à un placebo, l’efficacité du baclofène sur la consommation d’alcool après un an de traitement. Le protocole prévoit l’inclusion de 320 patients par des médecins expérimentés dans la prise charge des addictions, répartis sur l’ensemble du territoire national. Le traitement débute par 15 mg/J de baclofène, la dose est ensuite augmentée progressivement jusqu’à * Il convient de rappeler qu’il existe des structures pluridisciplinaires de prise en charge de l’alcoolodépendance. A titre d’exemple, un dispositif d’encadrement animé de façon collégiale par les services d’addictologie et de pharmacovigilance a été créé au CHRU de Lille et permet de mieux sécuriser la prescription et le suivi des patients alcoolo-dépendants auxquels serait prescrit du baclofène, après échec des thérapeutiques habituelles (19). l’obtention d’une efficacité et d’une tolérance acceptables. Le protocole peut être consulté au lien suivant : https://icrepec.ansm.sante.fr/Public/index.php. Enfin, l’Afssaps est en contact avec des promoteurs académiques et des firmes pharmaceutiques afin de stimuler la réalisation d’autres essais cliniques nécessaires pour développer les connaissances sur le baclofène dans le cadre du traitement de l’alcoolo-dépendance. Les professionnels de santé sont encouragés à inclure dans des essais cliniques leurs
patients alcoolo-dépendants, en échec des autres mesures de prise en charge, afin d’en
faciliter le recrutement et de répondre au plus tôt aux questions posées.

R é f é r e n c e s b i b l i o g r a p h i q u e s
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Source: http://www.visite-medicale-permis-conduire.org/wp-content/uploads/2013/11/Baclof%C3%A8ne-avril-2012-Afssaps.pdf

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